Anita Conti

Anita Conti, “ la Dame de la mer ”

A l’occasion des Journées du Patrimoine 2020, la salle d’exposition de l’île Tristan a été baptisée Anita Conti. La Ville rend ainsi hommage à cette pionnière.

A l’occasion des Journées du Patrimoine 2020, la salle d’exposition de l’île Tristan a été baptisée Anita Conti. La Ville rend ainsi hommage à cette pionnière, océanographe et aventurière des mers, qui a choisi de finir ses jours à Douarnenez en 1997.

« Si je n’étais pas portée par la mer de temps en temps, je serais morte. Sur la terre ferme, vous mesurez l’obstacle, en mer, vous ne mesurez rien. », affirme Anita Conti, dans un entretien sur France Culture en 1992. « Je ne suis rien, rien que l’espace et le vent », répétait-elle encore, enfant. Ses paroles sentent bon les embruns et la liberté. Mais elles reflètent aussi sa détermination et sa passion.

Un regard tourné vers les horizons lointains

Pour les marins qu’elle a fréquentés, elle était « La Dame de la mer ». Une femme d’exception dans l’univers masculin de la pêche. Dès les années 30, elle embarque avec un équipage de 60 hommes, sur le chalutier vapeur Vikings pour une campagne morutière de cinq mois en mer de Barents, dans l’Arctique.

Plus tard, elle sillonnera tous les océans, sur toutes sortes d’embarcations. Entre deux voyages en mer, elle rédige pour la presse des articles sur les richesses marines, des poèmes et des récits de voyage , qu’elle illustre de ses photographies.

La première femme océanographe

Archives municipales de Lorient

En 1935, elle rejoint l’équipage du premier navire-océanographe français. Elle étudie les fonds, dresse les premières cartes de pêche en vue d’optimiser l’activité des marins et des pêcheurs.

Elle prend déjà conscience de la surpêche et alerte sur la raréfaction de certaines espèces. Elle s’indigne du gaspillage des ressources marines et propose de rationaliser certaines pratiques.

Écologiste avant l’heure, elle défendra la protection des océans toute sa vie.

Une page de vie africaine

Entre 1943 et 1950, chargée du développement des pêches traditionnelles par le gouvernement d’Alger, elle navigue à bord de frêles pirogues africaines le long des côtes de Guinée et du Sénégal.

Anita Conti passera 10 années de sa vie en Afrique de l’Ouest. Elle y créera des pêcheries pour améliorer l’alimentation des populations locales, soucieuse de leurs conditions de vie, et encouragera des techniques de pêche durable et viable.

La passion des livres

Lorsqu’elle ne navigue pas, Anita Conti se consacre à son premier métier, celui de relieuse d’art. Elle expose ses reliures à l’Exposition coloniale de 1931, au Salon d’Automne à Paris en 1932, 1933 et 1935, mais également à Londres, Bruxelles et New York où elle est plusieurs fois primée.

Elle fut aussi une femme du monde qui croisa des célébrités du siècle, de Pierre et Marie Curie, Blaise Cendrars et Théodore Monod au docteur Schweitzer et à Léopold Sédar Senghor.

Tout au long de sa vie, Anita Conti multiplie les embarquements et les expériences qu’elle retrace dans trois livres, tous reconnus par les milieux scientifiques et maritimes : Racleurs d’océans, 1953 – Géants des mers chaudes, 1957 – L’Océan, les bêtes et l’homme, 1971.

© Anita Conti - Chalutier Terre Neuvas - Vickings les parcs 1939

La première femme à s'engager dans la Marine nationale

Dès 1939, Anita Conti obtient l’autorisation d’embarquer en tant que photographe de la Marine sur des dragueurs de mines en Manche et en mer du Nord, photographiant les tentatives de déminage.

De précieux témoignages

Tous ses voyages et expérimentations sont consignés dans des carnets. Elle y décrit le quotidien des équipages. A l’époque, on va sur la mer pour travailler. La vie à bord est rude.

En parallèle, ses photographies (près de quarante mille clichés) mettent en lumière toute la poésie et la magie qu’elle a observées à travers les océans. C’est un témoignage unique à cette époque, le regard sans détour d’une femme hors du commun.

Anita Conti s’est éteinte le 25 décembre 1997, à Douarnenez, à l’âge de 98 ans. Elle s’y était installée cinq mois plus tôt. Conformément à sa volonté, ses cendres ont été dispersées au printemps 1998 au large de la pointe de La Jument.